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Signal : le point sur la messagerie sécurisée qui fait trembler WhatsApp

16 janvier 2021
Par Thomas Estimbre
Signal : le point sur la messagerie sécurisée qui fait trembler WhatsApp
©Signal

L’application de messagerie Signal connaît un énorme succès ces derniers jours. Recommandée par Elon Musk, l’application intrigue et doit cette mise en lumière au récent virage opéré par son concurrent WhatsApp, propriété de Facebook.

Apparue en 2014, Signal est sans contestation possible l’application de ce début d’année. Sur Google Play comme sur l’App Store, la messagerie sécurisée figure en tête des téléchargements aux quatre coins de la planète (dont la France) et doit ce coup de pouce à WhatsApp. Comme son concurrent, Signal se présente sous les traits d’une application gratuite permettant de communiquer par écrit – à deux ou en groupe – ou encore de passer des appels audio ou vidéo et d’envoyer des fichiers. Une approche classique pour cette application disponible sur Android et iOS (ainsi que sur ordinateurs, voir l’onglet Fonctionnalités) qui se distingue de plusieurs de ses rivaux en mettant l’accent sur la sécurité. Depuis son lancement, Signal est considérée comme l’une des applications de messageries les plus sécurisées du marché. Une réputation qui lui permet aujourd’hui d’observer une très forte croissance de son nombre d’utilisateurs.

 © Signal
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Comment expliquer un tel succès ?

Le succès de Signal n’est pas uniquement lié aux atouts de l’application, mais à une annonce de WhatsApp. L’application de messagerie instantanée de Facebook a défrayé la chronique ces derniers jours suite à sa décision de partager davantage de données avec sa maison-mère. L’annonce d’un changement dans ses conditions d’utilisation a rapidement fait le tour du monde et inquiété plusieurs millions d’utilisateurs. Il y a tout juste une semaine, nous étions revenus en détail sur ces nouvelles règles qui entreront en vigueur le 8 février, à des degrés différents selon les régions. En cas de refus, il ne sera plus possible d’utiliser l’application.

Relativement autonome depuis son rachat par Facebook en 2014, WhatsApp fait craindre à ses plus de deux milliards d’utilisateurs une trop grande proximité avec le réseau social de Mark Zuckerberg. Face à la polémique naissante et à l’explosion des téléchargements de Signal, WhatsApp a très vite tenté de rassurer les utilisateurs européens sur l’utilisation de leurs données. La messagerie plaide l’incompréhension et assure que ces changements concernent surtout les pays en dehors de l’Europe. Sur le Vieux Continent (comprenant l’Union européenne et le Royaume-Uni), la firme affirme qu’il n’y aura « pas de changement » au sujet du partage des données.

Dans le même temps, Elon Musk – suivi par plus de 42 millions de personnes sur Twitter – s’est fendu d’un tweet invitant à ses abonnés à « utiliser Signal ». Le patron de Tesla, présenté comme l’homme le plus riche du monde, est aussi l’une des personnes les plus influentes du monde. Ces deux événements ont directement aidé Signal, jusqu’à créer une brève phase de saturation. Sur son compte Twitter, Signal avait reconnu jeudi dernier quelques lenteurs en raison d’une forte hausse du nombre de nouveaux utilisateurs.

Prise en main, fonctionnalités… à la découverte de Signal

Libre et open source, Signal est relativement simple à prendre en main, même lorsqu’on est un habitué de WhatsApp. Disponible sur Google Play pour les appareils Android ou l’App Store pour l’iPhone et l’iPad, l’application dispose aussi de déclinaison pour ordinateur. Après l’avoir installé sur son smartphone, il suffit d’installer la version correspondante à son système d’exploitation (Windows, Mac ou Linux).

 © Capture d’écran/LaboFnac
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Dès son paramétrage, l’application met l’accent sur la confidentialité et pourra demander des autorisations pour activer certaines fonctions. L’utilité des autorisations est expliquée sur le site de l’application et l’on retrouve des demandes classiques pour ce type d’applications (contacts, textos, médias, appareil photo, micro ou encore position pour partager son emplacement). La mise en route rappelle celle de WhatsApp avec une demande du numéro de téléphone pour créer un compte.

 © Capture d’écran/LaboFnac
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L’application vous demande ensuite de configurer votre profil en indiquant un prénom. Il est possible d’ajouter un nom de famille et une photo de profil pour être plus facilement reconnaissable. En bas, Signal rappelle que le profil est chiffré de bout en bout et invite alors à créer son NIP. Dès lors, vous accéderez à une boîte de réception et pourrez commencer à envoyer un message ou inviter des amis à passer à Signal. La partie Paramètres est également présente et simple à prendre en main, avec la plupart des fonctionnalités.

 © Capture d’écran/LaboFnac
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En venant de WhatsApp ou d’une autre application de messagerie telle que Telegram, l’interface de Signal pourra sembler moins conviviale. Pour une utilisation basique, elle permet néanmoins de s’y retrouver très facilement. Concernant la sauvegarde des conversations, Signal ne fait pas directement appel à un service cloud comme Google Drive ou iCloud, option présente sur WhatsApp. Il est néanmoins possible d’effectuer des sauvegardes chiffrées (avec une phrase de passe) sur son appareil. Pour faciliter la transition, les équipes de Signal ont expliqué sur Twitter comment transférer ses groupes de discussion. Depuis l’application, il est aussi possible d’inviter ses contacts individuellement.

Est-ce vraiment sécurisé ?

Signal séduit toujours plus d’utilisateurs en misant sur la sécurité et la confidentialité. Pour sécuriser les échanges, l’application prend en charge le chiffrement de bout en bout basé sur le protocole cryptographique Signal Protocol. Ce dernier a depuis été intégré dans d’autres messageries, telles que WhatsApp. Le fait de laisser son code source ouvert et de disposer d’un des chiffrements les plus sûrs a contribué à la popularité de Signal auprès des experts en sécurité. Le célèbre lanceur d’alerte Edward Snowden, utilisateurs de la première heure, ne manque jamais une occasion de vanter les mérites de l’application.

Interrogé par un internaute au sujet de la confiance que nous devrions accorder à Signal, celui qui vit en exil en Russie depuis 2013 répond : « Voici une raison : je l’utilise tous les jours et je ne suis pas encore mort ». En février 2020, le site Politico rapportait que la Commission européenne l’avait recommandé à ses employés. Sur son site, Signal évoque également le soutien de Jack Dorsey.

Qui est derrière Signal ?

Le développement de l’application est géré par la Signal Foundation, un organisme à but non lucratif basé en Californie. À l’origine du projet Signal, on retrouve le chercheur en sécurité informatique et cryptographe américain Moxie Marlinspike. Sur son site, il indique avoir « beaucoup voyagé » et qu’« il aime la sécurité informatique et le développement de logiciels, en particulier dans les domaines des protocoles sécurisés, de la cryptographie, de la vie privée et de l’anonymat ». « Mais je déteste aussi secrètement la technologie », ajoute-t-il.

 © Signal
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Cette aventure est également celle de Brian Acton, un nom bien connu puisqu’il s’agit du co-créateur de WhatsApp. Ce dernier a soutenu Signal en injectant 50 millions de dollars dans la fondation, quittant au passage Facebook sur fond de désaccord avec Mark Zuckerberg. Il siège depuis au conseil d’administration avec Moxie Marlinspike et Meredith Whittaker. Cette chercheuse a longtemps travaillé chez Google avant de rejoindre Signal fin 2020. Outre les subventions, la fondation indépendante est soutenue par les dons du public.

Article rédigé par
Thomas Estimbre
Thomas Estimbre
Journaliste
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