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Samsung Campus : un tremplin gratuit vers le développement Web

17 juillet 2018
Par Sofian Nouira

Depuis 2014, Samsung France a ouvert le Samsung Campus, une formation gratuite de deux ans au développement web pour les non-bacheliers de moins de 25 ans, afin de favoriser l’insertion professionnelle des jeunes. Une telle formation peut-elle vraiment déboucher sur des emplois concrets pour ceux qui la suivent ? Nous sommes allés à la rencontre de quatre étudiants qui l’ont suivie. Reportage.

À longueur d’année, nous vous rapportons les nouveautés technologiques des grands fabricants d’électronique, au premier rang desquels Samsung. En marge de ses produits, le fabricant coréen mène aussi une politique sociétale assez volontaire. Ainsi, en 2013, la marque a fixé quatre axes sociétaux pour l’Europe, dont l’éducation au numérique pour les plus jeunes, ainsi que la formation aux métiers du numérique dans un contexte de chômage globalement très élevé dans la tranche des 18-25 ans sur le vieux continent. Chaque filiale choisit ensuite les actions qu’elle souhaite mener localement. Chez nous, la pénurie en développeurs Web étant avérée, Samsung France a décidé de travailler sur cette thématique. Et c’est ainsi qu’est né le Samsung Campus en 2014.

Depuis, quatre promotions se sont déjà succédé sur les bancs de la formation. De quoi offrir un recul suffisant pour mesurer son impact. Est-elle vraiment qualifiante ? Les étudiants trouvent-ils vraiment dans la foulée un poste de développeur Web ? Sont-ils rémunérés correctement ? Autant de questions que nous nous sommes posées. Pour y répondre, nous avons rencontré quatre d’entre eux. Les deux premiers, Léanaëlle et Benjamin, font partie de la quatrième promotion, tandis que les deux autres, Avelaine et Housama, ont achevé le cursus depuis quelque temps déjà.

Reportage Samsung Campus

À gauche, Léanaëlle, à droite, Benjamin (© Brigitte Bouillot)

Reportage Samsung Campus

À gauche, Avelaine, à droite, Housama (© Brigitte Bouillot)

Le Samsung Campus

Avant de nous pencher sur leurs parcours, intéressons-nous d’abord au Samsung Campus. Il s’agit d’une formation entièrement gratuite au métier de développeur Web, pour les jeunes de moins de 25 ans n’ayant pas le bac en poche. Un point très important quand on sait que la grande majorité des écoles informatiques classiques n’acceptent pas les candidats n’ayant pas obtenu le baccalauréat. Le but est donc de recruter des élèves motivés, mais qui n’ont pas trouvé leur place dans le système scolaire.

Chaque année, Samsung reçoit entre 1500 et 2000 candidatures pour son Campus, pour 45 places au final. Les candidats doivent d’abord s’inscrire sur le site du constructeur. Puis une sélection se fait en amont de l’épreuve de la « Piscine », à laquelle participe une centaine de candidats. Nous y reviendrons plus loin.

Une fois admis, les étudiants n’ont plus à se soucier de rien dans le cadre de la formation puisque Samsung procure tout ou presque, des fournitures aux ordinateurs en passant par les locaux. Le Samsung Campus se trouve en effet hébergé au sein même des bureaux de Samsung France, à Saint-Ouen, en banlieue parisienne. De plus, le label « grande école du numérique » reçu par la formation en 2016 ouvre le droit à des bourses. Enfin, dernier détail d’importance : cette formation est dispensée par Epitech, l’une des écoles d’informatique les plus prestigieuses de France.

Reportage Samsung Campus

Des étudiants du Samsung Campus en train de plancher sur un projet, au sein des locaux de Samsung France. (© Brigitte Bouillot)

Des profils variés

Les clichés ayant la vie dure, avouons que nous nous attendions à croiser au sein du Campus une bonne proportion de jeunes geeks endurcis. Première surprise lorsque nous avons passé le pas de la porte de la formation : les femmes sont très représentées. Ensuite, au gré des discussions avec les uns et les autres, nous avons pu nous rendre compte que les profils des étudiants étaient très variés.

« J’étais au lycée, j’ai arrêté en première. J’ai travaillé en tant que magasinier quelque temps puis je suis entré dans la fonction publique. Je voulais être dans un département informatique de la police nationale. Mais faute de budget, j’ai été réaffecté et le service informatique n’a pas été créé », explique Benjamin, 21 ans et en deuxième année de la 4e promotion.

De son côté, Avelaine exerçait une profession assez éloignée de l’informatique : « je suis originaire de Paris, mais j’étais parti travailler en Loire Atlantique. J’étais fleuriste avant le Campus ». Comme pour définitivement casser tout stéréotype, elle ajoute d’elle-même : « je n’étais pas familiarisée avec l’informatique avant, ce n’était pas ma passion ou mon hobby ». C’est son frère qui lui a parlé du Samsung Campus et elle a décidé de tenter sa chance.

Le parcours de Léanaëlle est un peu différent dans la mesure où elle venait d’une terminale L, qu’elle n’a pas achevée. Un profil plutôt littéraire donc. « Je suis tombé par hasard sur une annonce pour le Samsung Campus et j’ai décidé de tenter ma chance », raconte-t-elle, avant de préciser qu’elle n’avait jamais codé avant d’intégrer la Piscine.

Quant à Housama, il était musicien, mais ne vivait pas de sa passion. « Je me suis orienté vers un « vrai » métier, la coiffure. Mais cela ne m’a pas plu. J’ai enchaîné les petits jobs, avant de découvrir l’école 42. J’ai raté leur piscine. Mais ils m’ont réorienté vers le Samsung Campus. La première expérience m’a beaucoup aidé à réussir la seconde. J’ai toujours été très geek, je joue beaucoup et je baigne dans cette culture. Mais ce qui est resté après la piscine, c’est l’approche nouvelle qui m’a séduit. Il n’y a pas eu de déclic à proprement parler. Cela s’est fait petit à petit, naturellement, au fil des étapes ».

Samsung Campus

Léanaëlle, au milieu de ses camarades de promotion. (© Brigitte Bouillot)

La Piscine, un rite initiatique

Une fois leur candidature initiale acceptée, les aspirants étudiants doivent se frotter à la redoutable épreuve de la Piscine. Ici, il n’est évidemment pas question de natation, mais plutôt d’immersion, pendant trois semaines. Cette épreuve permet à la fois d’acquérir les bases nécessaires au développement Web, mais aussi de tester la motivation des troupes. Et autant vous dire que le programme est copieux, comme le rapporte Léanaëlle : « Nous avions un projet par jour, de 9h30 à 23h42. Pendant trois semaines, on ne fait que coder. Comme évoqué plus haut, même les étudiants n’ayant aucune connaissance en informatique peuvent faire leurs preuves ici, tant qu’ils démontrent une motivation sans faille et une volonté d’apprentissage. La base de la Piscine, c’est vraiment d’apprendre à apprendre. Le but est d’être capable de continuer à apprendre par nous-mêmes une fois que nous sommes en entreprise avec l’apparition de nouvelles technologies », confie Benjamin, qui assure dans la foulée que « n’importe qui peut tenter sa chance, quel que soit le milieu social. Ici, c’est vraiment « quand on veut, on peut ». Il y a tout type de milieux sociaux, de gens différents ». Léanaëlle confirme : «  Je n’ai pas pu intégrer une école de code classique, car quand j’ai vu le prix des écoles, ce n’était pas possible. Je n’avais pas le budget. De plus, les écoles classiques se font en cinq ans, ce qui n’était pas compatible avec ma situation ».

Reportage Samsung Campus

© Brigitte Bouillot

Apprendre à apprendre

Lors de nos entretiens, tous les étudiants se sont accordés sur un point : l’efficacité de la pédagogie par projet dispensée au Samsung Campus. Dans cette formation, il n’y a en effet pas de professeur à proprement parler. Benjamin confie d’ailleurs : « j’ai mis entre trois et cinq mois pour me formater au système. Cela a été dur au début, car je restais dans un aspect assez théorique. Par exemple, quand on me donnait un projet, je faisais beaucoup de théorique alors qu’il faut se lancer assez vite ». Dans un premier temps, les étudiants n’ont qu’un projet par semaine. Puis, ils doivent jongler avec deux projets en parallèle, comme ils le feront dans leur vie professionnelle. Un jour par semaine est dédié aux évaluations. « Il peut nous arriver de décrocher, de douter, mais, dans mon cas, le rôle de la coach Myrtille a été essentiel. Le système est particulier, car c’est vraiment à nous d’aller chercher les informations », insiste Benjamin. Léanaëlle abonde dans le même sens : « comme beaucoup, je me sentais perdue, mais je me suis accrochée. Il m’a fallu six à sept mois pour me faire à ce mode de fonctionnement très différent de celui du système scolaire classique. J’ai mis un peu de temps à comprendre qu’il ne faut jamais prendre le problème dans son entièreté, mais le découper par blocs. »

La première année est à temps plein et intensive (1450 h), ce qui ne laisse pas le temps de travailler à côté. En deuxième année, les étudiants partagent leur temps entre les cours et stage en entreprise. Et après ? Une telle formation de deux ans suffit-elle à ouvrir en grand les portes de l’emploi ?

Reportage Samsung Campus

© Brigitte Bouillot

Des résultats probants

Sur les deux premières promos, plus de 80 % de ceux qui sont passés par les bancs du Samsung Campus sont en poste aujourd’hui. Mieux, la plupart ont signé dans les deux semaines qui ont suivi la fin des cours. Et 15 % ont décidé de suivre avec une autre formation, de type master. Le salaire moyen à la sortie de la formation était de 35 000 euros à l’année. Ces chiffres nous ont été fournis par le constructeur, sur la base d’un sondage auquel la grande majorité des étudiants ont répondu.

Les retours des étudiants que nous avons interrogés vont dans le même sens. Mieux, au-delà des chiffres, ils mettent en lumière le fait que les entreprises semblent s’arracher ces profils.
Benjamin raconte : « J’ai fini par trouver une agence Web dans le sud de la France, c’est ce que je recherchais. Je me suis présenté par email et ils m’ont rappelé pour me dire qu’ils cherchaient quelqu’un en back-end. J’ai eu un entretien classique, mais pas de test technique. C’est plus le côté humain qui a été mis en avant. Aujourd’hui, mon entreprise m’a proposé de continuer en CDI après la période de stage. Mais je reçois beaucoup de sollicitations par LinkedIn. Je vais continuer un peu. Je veux surtout ouvrir ma propre société à terme ».

Reportage Samsung Campus

Les compétences acquises lors de la formation semblent très prisées des entreprises (© Brigitte Bouillot)

Même son de cloche chez Léanaëlle, elle aussi encore en stage à date : « mon directeur technique aimerait que nous poursuivions après le contrat pro. J’aimerais ça. Mais je reçois beaucoup d’offres. Cela m’a donné énormément de confiance en moi. Toute ma vie, je me suis dit que je voulais vivre heureuse. Et c’est exactement ce que m’a apporté cette formation. Je me lève le matin, je suis heureuse, je suis contente d’aller au travail. J’apprends de nouvelles choses chaque jour. C’est en arrivant en deuxième année qu’on se rend compte de l’impact de la formation sur nos chances de travail ».
D’une promotion antérieure, Avelaine et Housama sont de leur côté déjà en poste. Avec un parcours assez identique dans la mesure où les deux ont été engagés par l’entreprise qui les a pris en contrat de professionnalisation. Avelaine précise : « j’ai fait mon contrat de professionnalisation chez Ysance et je suis resté chez eux en CDI. Je travaille sur leur section data management platform. Mon rôle est de développer la plateforme Web. La façon dont nous avons été formés au Campus (apprendre à apprendre) m’a permis de comprendre mes erreurs. Au final, le Campus m’a donné un avenir plus sûr, d’avoir un CDI que je n’aurai pas forcément pu avoir autrement. Je reçois des messages sur Linkedin pour me débaucher. Même si cela se passait mal dans mon entreprise actuelle, j’ai la tranquillité d’esprit, car je sais que je vais retrouver derrière du travail. Ce qui compte dans ce métier, c’est l’expérience. Il y a encore une pénurie énorme et les possibilités d’évolution sont réelles, peu importe la formation ».

Enfin, Housama travaille aujourd’hui chez l’éditeur français de jeux vidéo Focus Interactive, chez qui il avait décroché son alternance donc. « J’y suis resté. J’ai commencé au poste de développeur Web. À l’époque, le pôle Web était composé de deux personnes seulement. Il y a avait donc beaucoup de choses à développer. Quand je suis arrivé, j’ai lancé l’idée d’un CMS maison pour centraliser les différents projets du service. Comme il y a avait à faire, cela a été très instructif. Deux ans après, je suis toujours chez Focus. Je suis en CDI et je suis passé Lead Developer ».

Tous s’accordent à dire que cette formation a changé leur vie. L’avis d’Housama semble bien résumer le sentiment général des étudiants interrogés : « si c’était à refaire, je referais la même chose, car cela a été assez intense, dans les erreurs comme dans les succès ».

Comment s’inscrire ?

Les candidatures pour la 5e promo sont ouvertes depuis peu et vont durer jusqu’au 10 septembre 2018. Il s’agit donc de la promo qui sortira en 2020. La piscine de sélection aura lieu début octobre et une rentrée au Campus le 5 novembre. Si vous êtes intéressés pour vous-même ou l’un de vos proches, vous trouverez plus de détails sur cette page.

Article rédigé par
Sofian Nouira
Sofian Nouira
Journaliste
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